Etude de cas sur la participation des jeunes

Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme

Sénégal

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Formation en méthodes participatives, Dakar, Sénégal

Formation en méthodes participatives, Dakar, Sénégal

Yvonne, 28 ans, est atteinte de paralysie cérébrale et n’a jamais eu d’expérience professionnelle au-delà de courts stages non-rémunérés. Elle prend très à cœur son nouveau rôle de déléguée au Forum étudiant de l’association X: «J'aime aider les plus jeunes à dire ce qu'ils ont à dire». Après avoir bénéficié des services de l’association pendant 5 ans, Yvonne a récemment rejoint l’équipe du Forum étudiant en tant que bénévole. X est un organisme caritatif qui aide les jeunes en situation de handicap à trouver un travail et à mener une vie plus autonome. Au Royaume-Uni, les personnes handicapées de moins de 26 ans sont quatre fois plus susceptibles de ne pas travailler ou de ne pas être scolarisées que les personnes non handicapées; et un employeur sur cinq déclare être moins prêt à employer une personne handicapée.

Yvonne et ses quatre collègues dirigent le premier exercice du genre à X: une enquête auprès de 50 bénéficiaires pour recueillir leurs points de vue et leurs suggestions sur le programme de travail de l’association. Après avoir été formés par un membre du personnel sur plusieurs semaines, Yvonne et l'équipe entreprennent de s'adresser aux étudiants: ils remplissent des questionnaires ensemble, enregistrent leurs discussions de groupes et conduisent même des entretiens individuels. Leurs questions portent principalement sur le programme actuel et les moyens de l’améliorer, mais également sur la qualité et l’accessibilité des services.

Dans le contexte d’organismes caritatifs au service des jeunes, le terme 'participation' signifie leur implication à différents niveaux de la prise de décision, mais aussi la possibilité pour eux d'exprimer leurs opinions, les outils et la confiance nécessaires pour influer sur les décisions qui affectent leur vie. Le Ministère de l’Education du Royaume-Uni a récemment publié des directives pour faire mieux entendre la voix des jeunes afin de les encourager à «devenir des participants actifs dans une société démocratique». Le plan stratégique de X stipule :

«nous allons continuer à impliquer les jeunes avec lesquels nous travaillons dans la planification de nos services». À l’heure actuelle, l’association, qui dispose de bureaux à aire ouverte où cohabitent harmonieusement le personnel et les étudiants, implique les bénéficiaires dans le recrutement du personnel et des cadres supérieurs.

Mais inclure les jeunes à tous niveaux de prise de décision peut être problématique et nécessite avant tout un bon degré de transparence. La directrice des services, Marine, qui a discuté avec Yvonne et le Forum de la nouvelle politique de participation, explique: «Les idées des jeunes sont les bienvenues, mais nous essayons de rendre le processus de consultation plus clair pour tout le monde. Les commentaires que nous recevons sont examinés et soumis au jugement professionnel. Mais si nous n'agissons pas ou ne mettons pas en œuvre la suggestion d'un étudiant, nous devons expliquer pourquoi». En effet, le succès des initiatives de participation dépend moins d’un processus de consultation efficace que du suivi fourni: trop souvent, les jeunes déplorent une participation purement symbolique lorsque le processus se termine de manière abrupte, sans précision quant à l’avenir des informations et des retours qu’ils ont fournis.

Yvonne rencontre l'équipe du Forum pour examiner les résultats du sondage, qui sont frappants. Elle raconte avec émotion qu’un grand nombre d’étudiants sont trop intimidés pour parler de leurs idées et de leurs problèmes au personnel: «Beaucoup disent que ça ne sert à rien, puisque qu’aucun changement n’a eu lieu dans le passé».

Parmi les principales recommandations formulées pour améliorer la communication, citons une formation plus approfondie du personnel et des supports accessibles, ainsi que la création d’un club d’expérience professionnelle dirigé par des étudiants. Quelques semaines après que les résultats ont été communiqués au personnel, la directrice des services a été invité au Forum pour donner une réponse officielle: «Nous examinons sérieusement vos préoccupations. Nous souhaitons que le Forum fournisse des rapports plus fréquents au conseil d’administration et effectue ce type d'enquête plus régulièrement». En quittant la réunion, Yvonne, l’air perplexe demande: “C’est tout?”.

La participation des jeunes est un processus complexe: il est essentiel de mettre en place un système de communication clair, et de bien appréhender les attentes des intéressés pour éviter de les décevoir et de leur donner l'impression de ne pas être entendus. Néanmoins, l’exercice de sondage est un succès, du point de vue de la prise de confiance des jeunes impliqués, mais aussi du point de vue du personnel, qui doit s’habituer à se soumettre plus souvent au regard critique des bénéficiaires. C’est donc un exercice de changement de culture organisationnelle. Comme Yvonne le résume: “On veut changer beaucoup de choses, alors ça met plus de temps”.

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